Mots tus

Une newsletter sur l'écriture et l'intime, à la première personne. Poèmes, humeurs et extraits de "La sensation", un projet d'auto-fiction

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Par Damien TESTU
15 déc. · 2 mn à lire
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"Ça me fait toujours aussi mal quand on ne veut pas de moi. Comme si c’était la première fois."

Mots tus, bouche décousue - Newsletter #5

Seize ans quand on s’embrasse et

J’aimerais que nos doigts s’entrelacent et

Je cours après toi pour te rattraper

Avec tout sauf l’envie de te laisser

Ta bouche est trop belle pour être quittée 


humeurs

Décembre est là. C’est l’heure du bilan et je ne suis jamais doué pour compter les points. Il pleut tous les jours ou presque. Comme l’année dernière, mais pire encore. J’ai besoin de me réchauffer. Des bras, des draps, des photos de toi. Je cherche la chaleur un peu partout. C’est peut-être trop d’ailleurs, comme moi. Je fais la liste de mes excès affectifs : je suis trop collant, trop émotif, trop impliqué. Et pas qu’en décembre.

Ça me fait toujours aussi mal quand on ne veut pas de moi. Comme si c’était la première fois.

Le premier rejet, ton regard qui esquive le mien, ma main qui cherche la tienne en vain. Le froid, la neige, cette bruine que je déteste car elle ne sert à rien, elle mouille à peine les cheveux, elle ne coule pas sur les joues. Inutile. La pluie, ça sert à tremper. Aujourd’hui, aucune purification au programme — les péchés seront à la vue de tous et les stigmates aussi. Je n’ai pas arrêté d’écrire, j’ai arrêté de publier. J’ai gardé mes états d’âme pour moi pendant quelques temps, alors peut-être qu’aujourd’hui la coupe est pleine, ça déborde, ça se renverse, il y en aura bientôt partout.

Je marche sur du verre, j’ai la tête à l’envers. L’orage fait rage dehors, rien à faire. Tes doutes diluent mes envies. Il est tard, allons dormir.

Je pleure quand je pense aux baisers. Je pense tous les jours à toi. Sur mon épaule ou au dessus de moi, je ne sais pas très bien où tu es. Je porte ma croix tous les jours, elle me protège — comme toi. Je ferme les yeux pour te voir quand les éclats de ciel qui nous séparent sont un peu trop imperméables.

Viens, je t’attends.


Une pierre de plus

Sur le mur de ma solitude

Une plume de perdue

Au total, je ne les compte plus 

Le sel, le couteau

La plaie, les échos

De ton rire, de ta voix

Les choses qu’on s’est dites

Auxquelles je ne crois pas

J’arrête de respirer

Pour ne pas pleurer

Tu ne trouves pas que j’ai

Un visage pour être aimé ?


la sensation

Vite, il faut faire la liste de toutes les choses sur lesquelles je dois écrire avant que les idées ne s’évaporent.

C’est comme un coup de scalpel dans la peau c’est loin d’être agréable mais c’est nécessaire il faut avoir un peu mal pour s’approcher de la vérité — la caresser être sincère droit dans ses bottes pas besoin de la permission des autres juste de la mienne et tant pis si ça les vexe ou les surprend ou les terrasse alors je griffonne dans un carnet ou je tapote sur mon écran :

Le voyage à Prague « pourquoi tu viens pas avec les autres ? »

W & la capote qu’il a retirée sans me le dire

K & le CELSA que j’ai raté

R & les classes sociales

JB & la psy que M m’a recommandée

Je ne suis plus à ma place là-bas

Comment les gens me perçoivent

La mode, la superficialité, le mondain

L’écriture pour faire sens

Les masques que je porte

Mettre en scène ma propre vie — jusqu’au jour où j’ai rencontré des personnes qui ne voulaient pas que je me cache 

Je n’ai jamais rien raté

J’ai fait mon auto diagnostic 

J’ai peur de l’échec